Newsletter #18

Dernier épisode de notre minisérie estivale sur les poissons 🌊🐡

Temps de lecture : 5 minutes 🕒

De mémoire de gobie

Ces derniers jours d’été, avec leur météo un poil capricieuse, me rappellent mes vacances d’enfance en Bretagne. 

Affublés d’un style inimitable qui n’existe que là-bas – un mélange de pull, de short, de k-way, de casquettes, de maillots de bain et de bottes de pluie – nous nous rendions à la plage le matin, les bras chargés de pelles, de sceaux et d’épuisettes. 

À marée-basse, on abandonnait le sable – trop monotone – pour nous rendre dans les rochers (« attention c’est glissant ! ») à la recherche de petits animaux piégés dans les cavités révélées par la mer en se retirant. 

C’étaient des petits univers merveilleux. Des échantillons de mer offerts à nos regards d’enfants curieux. 

On y cherchait crabes, moules, bulots, crevettes, méduses, étoiles de mer, oursins… J’avais une véritable frousse des Bernard-l’hermite (je viens de réaliser à quel point ce nom est excellent), qui me rappelaient un peu trop les araignées (qui me terrorisaient à l’époque, mais que j’ai fort heureusement appris à connaître et à tolérer depuis). 

Mais ce que j’espérais surtout voir… c’étaient des petits poissons. Des poissons sauvages à portée de regard. 

Imaginez un petit peu la tête que j’aurais tirée si, au moment où je disais « oh regardez, j’ai trouvé un poiss… », le poisson en question décollait dans les airs pour aller atterrir dans la flaque la plus proche ! 

Voilà qui serait tout à fait le genre des gobies. 

Les gobies ou Gobiidae sont la famille de poissons marins la plus diversifiée au monde, avec près de 2000 espèces. 

Pour respirer, il puise dans ses réserves d’oxygène préalablement compressées dans ses branchies. Il est aussi capable d’utiliser la respiration cutanée en absorbant l’oxygène de l’atmosphère à travers sa peau humide. 

Et ça ne s’arrête pas là puisque le gobie… grimpe. Oui, il escalade mesdames et messieurs ! Ses nageoires pelviennes fusionnent pour n’en former qu’une seule qui agira comme une sorte de ventouse. Le gobie peut alors se coller à certaines surfaces (rocher, arbres…) pour les gravir à l’assaut de ses proies préférées : crustacés, vers, insectes… (qui doivent au passage être bien dégoutés qu’un poisson vienne les déloger jusque-là).

À ce stade de l’article, vous ne serez plus surpris si je vous annonce que le gobie saute, notamment pour échapper aux attaques de ses prédateurs, comme les oiseaux. 

Des poissons ? Des ninjas ? Les deux ? Je vous laisse en juger. 

Une fois dans une mare résiduelle, le gobie sait exactement où il se trouve – dans quelle direction et à quelle distance sauter pour atteindre la mare voisine dans le cas où il aurait besoin de quitter les lieux précipitamment.

Il est même capable de sauter de cavité en cavité jusqu’à retrouver la mer ! 

Si les gobies sont privés de la possibilité d’inspecter les lieux à marée-haute, ils sautent à l’aveugle et s’échouent misérablement sur un rocher dans à peu près 85% des cas – c’est-à-dire souvent. Mais lorsqu’ils ont eu l’occasion de scanner les lieux, leur précision passe de 15 à 97%. 

Et le gobie a la mémoire longue ! Après un séjour de 40 jours en aquarium, il se souvient toujours précisément des lieux. Et à ce jour rien n’indique que cette durée est un maximum. Par ailleurs, il est capable de mémoriser sans cesse de nouveaux lieux. 

En s’adaptant à un environnement instable, le gobie a su développer une mémoire spatiale hors du commun, doublée à une mémoire des cycles de marée. On est bien loin du mythe tenace de la prétendue « mémoire de poisson rouge », non ? 

🦐 Info-bonus : certaines espèces de gobies vivent en ménage avec… des crevettes ! Et ces relations symbiotiques durent toute une vie 💕. Je vous en parle en détail un de ces quatre ? 

…Et dans la liste de mes poissons étranges préférés :
Imaginez… vous marchez sur le sable fin au coucher du soleil, les pieds dans l’eau, une brise dans les cheveux, vous soupirez de bien-être et sous vos pieds il y a ça 👇

Sources :